Léman Express et 2030 ne pourront se faire sans la ligne du Tonkin

English abstract available at the end of this article.

Avec la récente concrétisation du projet Léman 2030 entre Genève et Lausanne, la décision populaire d'appeler le nouveau RER du Grand Genève "Léman Express", et le choix d'une double flotte franco-suisse pour ce dernier, le développement des transports publics autour du Lac Léman est enfin en cours de structuration. C'est en effet une nécessité que de penser à l'avenir d'une zone unique, transfrontalière, largement influencée par ses caractéristiques géographiques, et en plein développement.

Tonight's sunset on Lake Geneva aboard the @CGN_leman N2 boat from #Thonon to #Lausanne @1000Switzerland #switzerland pic.twitter.com/TCiu9K5v31

— Jordan Girardin (@JordanGirardin) October 15, 2014

Comme j'en parlais il y a quelques mois, ces développements permettent de délivrer tout le potentiel d'une région dont la mobilité reste à ce jour particulièrement délicate. Pourtant, un grand paradoxe existe encore et toujours : celui de la ligne du Tonkin, ce petit tronçon à l'est d'Évian en direction de la frontière suisse à St-Gingolph. Une fois la ligne CEVA complétée, le Tonkin sera le seul chaînon manquant dans l'arc lémanique ferroviaire. Je tiens à rappeler à quel point sa réouverture est cruciale. 

Les projets Léman 2030 et Léman Express ont la double ambition de désengorger et de faciliter les déplacements (d'une part), et d'anticiper les futurs augmentations de flux de passagers (d'autre part). Sur ce dernier point, il parait insensé de vouloir concentrer tous ces effort sur un seul axe (l'axe Nord Annemasse-Genève-Lausanne-Montreux) quand un axe sud (Annemasse-Évian-St Gingolph-St Maurice) ne demande qu'à être inclus.

En s'amusant un peu à faire des calculs (en estimant le trajet Lausanne-Genève en 30mn, Genève-Annemasse en 20mn, Annemasse-Évian en 45mn, Évian-St Gingolph en 20mn), on se rend compte qu'il serait plus judicieux de voyager d'Annemasse à St Maurice via le sud du Léman, laissant ainsi le Léman Express aux larges flux pendulaires attendus. La construction d'un court tronçon de connexion à l'embouchure du Rhône pourrait même rendre les connexions vers Villeneuve et Montreux plus attractives.

Comme l'association RER Sud-Léman tient à le démontrer, la région du Tonkin, à la géographie étroite mais sublime, bénéficierait énormément de cette ligne au niveau local, délestant la route départementale dangereuse et saturée en redirigeant une partie du trafic sur des trains cadencés, plus silencieux et propres.

Cet amour pour le train que la Suisse, la région Rhône-Alpes et le Léman partagent rendent le cas du Tonkin encore plus paradoxal et surprenant. Si l'on tient réellement à penser les flux du futur non pas jusqu'à 2030, mais bien au-delà, il est absolument nécessaire de planifier la réouverture de ce petit tronçon et l'extension en conséquence des services CFF vers Évian et/ou TER vers St Gingolph.

Dans mon projet de thèse doctorale sur le voyage dans les Alpes pendant le Siècle des Lumières, je remarque que de nombreux voyageurs s'étonnent des conditions difficiles sur la rive sud du Léman (la rive de Rousseau et de Julie), alors que sur la rive Nord les voyageurs se ruent entre Genève et Lausanne pour admirer confortablement la vue sur les Alpes et rejoindre le Simplon. Ne commettons pas cette erreur une nouvelle fois.

Si le bateau a toujours été un formidable outil sur le Léman, il ne faut pas oublier d'en terminer la réalisation ferroviaire.

English abstract: the region of Lake Geneva is currently making significant progress in the evolution of its railway system. Under the project name "Léman 2030", the increasingly-saturated line between Geneva and Lausanne will see its number of tracks doubled, journey times improved and a brand new fleet of double-decker trains able to anticipate the constant rise of passengers. In addition to that, the Swiss network is finally being connected to the French one with the opening of CEVA in 2019 (read more in one of my previous articles). Despite these ambitious projects, one final section of Lake Geneva is yet to be reopened: the 'Tonkin line' between Évian and the Swiss border. Although this line seems minor, its potential is enormous as it will offer many alternatives to passengers who nowadays rush to the saturated north line between Geneva and Lausanne. If we wish to think beyond 2030, we must consider this tiny section which will finally complete the railway loop all around Lake Geneva.